Ici-F9OE

... après le chien !
C'est ce que j'entendais régulièrement. Beaucoup de vérité dans cette affirmation. Pas de quarts de nuit et au port pas de service, si ce n'est l'obligation d'être présent de 9 à 11 h locales pour une éventuelle visite de Monsieur l'Inspecteur des PTT.

Aux "Chargeurs Réunis" le Radio est responsable des deux bibliothèques du bord, une centaine de bouquins qui doit contenter la plupart des lecteurs ... Pas facile. De toute façon, au bout d'un certain temps, la routine et l'ennui s'installant, on lit tout (ou presque !).
Dans d'autres compagnies, le Radio est "marchand de soupe", comprenez qu'il est le responsable de l'approvisionnement des vivres. C'est un poste qui fait généralement l'unanimité contre vous en peu de temps, tiraillé entre les soucis d'économie du Pacha et les prouesses culinaires du cuistot ! Sur le Daloa il faut reconnaitre que c'est Byzance, ou presque. Le frigo est toujours plein ! Si l'on y trouve souvent des langoustes, pas question d'un bon Camembert ou autre Bleu d'Auvergne qui eux doivent venir par avion, donc hors de prix !
Sur les conseils d'un Ancien, j'avais en général un régime de bananes dans le "shack". " Tu la manges quand elle tombe "... Il avait raison et j'avais quelques visiteurs assidus ! Je n'ai jamais retrouvé cette saveur...

La veille, tant sur 500 kHz que sur les ondes courtes, n'était pas incompatible avec l'écoute des bandes amateurs. Intéressante expérience de SWL me permettant d'expédier des comptes-rendus à Lucien F8TM qui tenait dans Radio-REF la chronique de l'Union Française. C'était encore le temps des FF8, l'Afrique Occidentale Française (Sénégal, Mauritanie, Soudan qui deviendra le Mali, Guinée, Côte d'Ivoire, Niger, Haute-Volta qui deviendra le Burkina Faso et le Dahomey, actuel Bénin) ) et des FQ8, l'Afrique Equatoriale Française (Gabon, Congo, Tchad et l'Oubangui Chari qui deviendra la République Centrafricaine) ...

Bien que relié aux quatre coins du monde, le Radio est pourtant souvent seul. Sur la passerelle deux ou trois personnes en permanence, de même à la machine... En 1958 pas de GPS ni de téléphone via satellite, le Radio est l'unique lien avec la terre, tant pour les activités du bateau que pour relier les quarante membres du bord à leur famille. Les temps de navigation entre deux ports ne sont guère importants et n'isolent pas trop longtemps ; il n'en est pas de même pour un Dakar-Boston ou un Singapour-Durban...
Par ailleurs, étant seul dans sa spécialité, il y a des moments où l'on mesure les responsabilités, d'où cette sensation d'isolement, avec un seul interlocuteur : le Pacha ! Il vaut mieux que les rapports soient les meilleurs possible...
Est-ce pour ces privilèges que le Radio est souvent jalousé ?

Le plus heureux à bord après le chien ? Oui je le crois...